
L’analyse post-incident doit débuter par l’isolement immédiat des systèmes affectés pour préserver l’intégrité des preuves. Une capture bit-à-bit des supports de stockage, réalisée avec des outils comme FTK Imager ou dd, constitue la base de toute investigation ultérieure. Cette copie forensique, dont l’empreinte cryptographique (SHA-256) doit être documentée, sert de fondement à l’expertise numérique et garantit l’admissibilité des éléments devant une autorité judiciaire. Toute action directe sur les systèmes originaux compromet la chaîne de custody.
L’enquêteur se concentre ensuite sur la reconstitution de la chronologie de l’attaque en corrélant les artefacts du système. L’examen des logs du pare-feu, des horodatages du registre Windows (par exemple, les clés UserAssist ou ShimCache) et des métadonnées des fichiers permet de retracer les mouvements de l’attaquant. En France, cette phase d’analyse doit strictement respecter les procédures définies par le Code de procédure pénale, notamment pour les opérations de perquisition en ligne, afin que les preuves numériques recueillies soient opposables lors d’une procédure.
La phase post-événement implique une criminalistique numérique avancée sur la mémoire vive (RAM) et les artefacts résiduels. L’extraction de processus malveillants furtifs de la mémoire, ou l’analyse des fichiers de pagination, peut révéler des outils d’accès à distance ou des scripts PowerShell obfusqués non présents sur le disque. Cette analyse technique approfondie est indispensable pour déterminer l’étendue de la compromission, identifier la méthode d’exfiltration des données et renforcer les contrôles de sécurité contre de futurs incidents de cybersécurité.
Acquisition des preuves numériques
Isolez immédiatement le système compromis du réseau, mais évitez son arrêt brutal pour préserver les données volatiles en RAM. Utilisez un matériel de blocage en écriture pour connecter votre station d’acquisition et empêcher toute altération des preuves. La première étape de l’investigation post-événement consiste souvent à capturer la mémoire vive avec des outils comme FTK Imager ou un script Linux dédié, documentant scrupuleusement la chaîne de custody dès ce stade.
Pour le stockage persistant, privilégiez la création d’une image bit à bit (bit-stream image) du support via des méthodes reconnues. L’utilisation d’un duplicateur numérique forensique (Tableau, WiebeTech) garantit l’intégrité des données en générant une signature cryptographique (hash SHA-256). Cette copie, servant de base légale à l’expertise judiciaire, doit être réalisée sur un support vierge et stockée sécurisé, distinct de l’original.
Adaptez votre protocole d’acquisition à la nature de l’incident et aux contraintes opérationnelles. Face à un système ne pouvant être interrompu, une acquisition live depuis un réseau de confiance est nécessaire, bien que plus complexe. Pour les environnements virtualisés, snapshottez la machine et exportez les disques virtuels. Dans le cadre d’une cyberenquête, l’enquêteur doit aussi collecter les logs réseau, les métadonnées des pare-feux et une copie des sauvegardes cloud, si pertinentes pour l’analyse post-incident.
Chaque action doit être consignée dans un rapport détaillé mentionnant l’heure, la méthode, l’outil et les hashs. Cette documentation rigoureuse est fondamentale pour la criminalistique digitale et répond aux exigences du droit français, où la régularité de la preuve est primordiale. L’objectif est de fournir aux experts en cybersécurité une copie fiable et non altérée pour leur analyse approfondie.
Analyse de la mémoire vive
Capturez l’intégralité de la mémoire physique immédiatement après l’incident en utilisant un outil comme WinPMEM ou LiME pour Linux. Cette preuve volatile contient des artefacts cruciaux : clés de chiffrement en clair, processus malveillants masqués et connexions réseau actives qui disparaissent au redémarrage du système.
Méthodologie d’extraction et d’interprétation
L’expertise en analyse mémoire requiert l’extraction de structures de données kernel. Utilisez Volatility avec des profils spécifiques au système d’exploitation pour lister les processus, les DLL chargées, les appels système et les connexions réseau. Un enquêteur doit rechercher les injections de code dans les espaces mémoire de processus légitimes, une technique courante pour éviter la détection.
L’examen criminalistique des canaux de communication non persistants est fondamental. La mémoire vive révèle les historiques des navigateurs web, les sessions de messagerie instantanée et les fragments de documents ouverts au moment de l’incident. Ces données digitales fournissent un contexte opérationnel pour la cyberenquête.
Intégration dans l’enquête judiciaire
L’investigation post-événement doit corréler les artefacts de la mémoire avec les preuves sur disque dur. Une connexion réseau extraite de la RAM peut être confrontée aux logs du pare-feu pour établir une chronologie d’attaque. En France, la manipulation de cette preuve numérique doit respecter la procédure pénale pour garantir son admissibilité dans une procédure judiciaire.
L’analyse de la mémoire vive identifie les rootkits en noyau qui modifient les structures de données système pour se dissimuler. L’extraction et l’examen des modules kernel chargés, des pilotes et des interruptions système sont nécessaires pour détecter ces menaces persistantes avancées et renforcer la sécurité post-compromission.
Reconstitution de la chronologie
Établissez systématiquement une ligne temporelle en corrélant les horodatages du système, des journaux et du registre. Utilisez des outils de criminalistique numérique comme Log2Timeline pour automatiser l’agrégation des artefacts (fichiers, événements, connexions réseau) en une chronologie normalisée, exprimée en temps universel coordonné (UTC). Pour une investigation solide, vérifiez la cohérence des horloges système et recoupez les données des différents médias (disques, mémoire vive, captures réseau) pour identifier les écarts ou les manipulations délibérées.
Analysez les artefacts volatils et persistants pour déterminer l’enchaînement des actions de l’attaquant. Les horodatages MFT (Master File Table) sous Windows, les entrées de bash_history sous Linux ou les clés Prefetch constituent des preuves précises pour retracer l’exécution de programmes, la copie de fichiers et les mouvements latéraux. Cette expertise permet de distinguer l’activité utilisateur légitime des actions malveillantes survenues pendant la phase post-incident.
Dans le cadre d’une cyberenquête judiciaire en France, la chronologie doit respecter la chaîne de custode et être documentée pour être opposable. L’enquêteur doit être en mesure de présenter la méthodologie de corrélation des horodatages devant un tribunal, en expliquant comment les données brutes ont été traitées pour produire cette reconstitution post-événement. L’objectif est de fournir une narration factuelle et inattaquable de l’incident de sécurité.








